Occitanetudesmetiers

Trabalhan ambc l’occitan

Aurélien Bertrand

Responsable du département des archives et manuscrits du CIRDOC
Institut occitan de cultura à Béziers

Quelle est votre formation ?

« J’ai fait une licence et un master d’occitan à Montpellier. Pour avoir une double compétence, j’ai également fait en 2011/2012 une licence à distance de bases de données documentaires. Je n’avais jamais fait d’occitan avant l’université. Au début c’était compliqué, il fallait que je cherche dans le dictionnaire chaque mot pour récupérer mon retard, mais en deux mois c’était fait. J’ai commencé à travailler au CIRDOC en 2012. Il cherchait quelqu’un avec la double compétence occitane et archiviste. Ce qui fait ma force d’un point de vue professionnel, c’est la double compétence. Dans de nombreux domaines, l’occitan permet bien souvent de sortir d’une pile de CV. »

En quoi consiste votre travail ?

« Au quotidien, mon travail est de classer, d’inventorier et de faire la médiation des archives qui sont au CIRDOC. Les archives sont surtout les fonds de manuscrits. Le terme « manuscrit » désigne une production directement liée à un auteur qui est non éditée. Cela peut être une feuille de papier écrite à l’encre noire mais cela peut aussi bien être un document tapé à la machine ou un document audio. Je mets en ligne ou je présente ces documents sur le site occitanica.eu qui est la médiathèque en ligne du CIRDOC. Je fais aussi les publications d’inventaires accessibles sur un site qui s’appelle calames.abes.fr. D’être référencé sur cette base de données nous permet de donner une visibilité internationale aux manuscrits occitans. Cela veut dire que si je publie une notice d’inventaire sur un manuscrit occitan de Joan Boudou, le monde entier sait qu’au CIRDOC il y a tel ou tel manuscrit de Boudou. Nous avons aussi à traiter de plus en plus des fonds occitans de bibliothèques extérieures, car, bien souvent, elles n’ont pas les connaissances culturelles et linguistiques pour les comprendre. En plus de cela, je suis en lien avec la recherche. En général je reçois à peu près deux ou trois demandes par jour de chercheurs pour un document précis. De temps en temps aussi, je participe à une journée d’études pour présenter un fonds du CIRDOC lié à une thématique donnée. »

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier ?

« Ce qui me tient à cœur, c’est de rendre accessibles les archives. Les gens ont parfois une vision poussiéreuse des archives et ce qui m’intéresse c’est de réussir à créer un intérêt pour une chose qui semble morte. Souvent, quand je fais une visite du CIRDOC, je montre des manuscrits. On peut les toucher, les prendre en photo. J’essaie un peu de démystifier les archives. »

Il vous arrive de recevoir des gens qui ne connaissent rien à l’occitan ?

« Oui et il y aussi des gens qui n’osent pas pousser la porte, car ils ont des idées préconçues. L’hostilité relative qui peut exister par rapport à l’occitan est due à un manque de connaissances, mais c’est intéressant de débattre et d’expliquer dans la mesure du possible. Il ne faut surtout pas le faire d’une manière agressive. Moi je pose les faits et après je laisse les gens se forger un nouvel avis ou pas. »

Est-ce qu’il y a quelque chose dans votre travail qui vous rend particulièrement fier ?

« Ce qui me rend fier dans mon travail c’est qu’en général quand Noël arrive, je reçois soit un mail de remerciement, soit une bouteille de vin ou des chocolats de la part de gens qui ont été très contents de mon travail. Il m’arrive aussi parfois grâce aux archives de recréer du lien entre des personnes séparées. Il y a une chose incroyable qui m’est arrivée. Un jour un homme m’a contacté par ce qu’il avait tapé le nom de son père sur internet et il était tombé sur une notice d’inventaire archivistique que j’avais faite. Nous avions deux lettres que son père avait échangées avec quelqu’un qui avait été déporté avec lui pendant la seconde guerre mondiale. Son père ne lui avait jamais parlé de cette période. J’ai senti une grande émotion chez cette personne et c’est un souvenir fort que j’ai encore aujourd’hui. Parfois cela peut être des gens qui cherchent des textes en occitan écrits par un membre de leur famille. Cela peut être trois poèmes ou deux textes. Cela fait plaisir aussi. »